31. Limitation de l’imputation des déficits agricoles : prise en compte des dividendes

Par une décision du 21 mars 2024, le Conseil d’Etat a rejeté le pourvoi en cassation formé par un contribuable qui contestait un arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris du 17 mai 2023 qui avait confirmé la remise en cause de l’imputation de déficits agricoles sur les autres revenus du foyer fiscal (CAA Paris 17/05/2023, n° 20PA01900 ; CE (na) 21/03/2024 n° 475977).

En principe, la détermination de la base de calcul de l’impôt sur le revenu tient compte de l’ensemble des revenus de chaque foyer fiscal en autorisant la compensation entre les revenus positifs et les déficits (art. 156 du CGI). Ainsi que le précise l’administration, le caractère global et progressif de l’impôt sur le revenu conduit à faire masse de tous les résultats obtenus par le contribuable, au cours d’une même année, que ces résultats soient positifs ou négatifs (BOI-IR-BASE-10-20).

Ce principe est toutefois assorti de plusieurs exceptions qui concernent notamment les déficits fonciers, les déficits commerciaux non professionnels et les déficits agricoles.

Les règles de report des déficits agricoles sont plus contraignantes que celles afférentes aux déficits des activités industrielles et commerciales. Ainsi, n’est pas autorisée l’imputation des déficits provenant d’exploitations agricoles lorsque le total des revenus nets d’autres sources excède 119 675 €. Ces déficits peuvent cependant être admis en déduction des bénéfices de même nature des années suivantes jusqu’à la sixième inclusivement.

Le montant mentionné ci-dessus est révisé chaque année selon les mêmes modalités que la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.

Cette disposition, connue par les spécialistes sous le nom d’amendement « Gabin » en référence au célèbre acteur, a pour objet de dissuader les comportements d’optimisation fiscale excessive consistant à exploiter volontairement et durablement une exploitation déficitaire dans un but de loisir et à imputer ces déficits sur des revenus issus d’autres activités.

Afin d’empêcher le célèbre acteur d’imputer ses déficits agricoles sur ses autres revenus non agricoles, la loi n° 64-1279 du 23 décembre 1964 de finances pour 1965 avait instauré l’interdiction d’imputer ce type de déficits dès lors que les revenus non agricoles excédaient un certain montant.

Dans l’affaire examinée par le Conseil d’Etat en mars 2024, le contribuable contestait le fait que l’administration fiscal ait pris en compte les dividendes perçus, soumis au prélèvement libératoire de l’impôt sur le revenu prévu par l’article 117 quater du code général des impôts, pour déterminer le total des revenus nets d’autres sources.

Pour les juges d’appel, les revenus nets d’autres sources, c’est-à-dire les revenus autres qu’agricoles perçus par le contribuable, dont le total ne doit pas dépasser un plafond pour que les déficits provenant d’exploitations agricoles puissent être déduits du revenu d’un contribuable, ne se limitent pas aux seuls éléments du revenu global soumis à l’impôt sur le revenu selon un barème progressif. Ces autres revenus doivent inclure notamment les revenus soumis, en application de l’article 117 quater du code général des impôts, au prélèvement libératoire de l’impôt sur le revenu.

Ainsi, c’est à bon droit, et sans méconnaître les dispositions du 1° du I de l’article 156 du code général des impôts, que l’administration fiscale a pris en compte les dividendes perçus par le requérant, soumis au prélèvement libératoire de l’impôt sur le revenu prévu par l’article 117 quater du code général des impôts (désormais prélèvement forfaitaire unique dénommé aussi flat-tax).

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